Informations recueillies par Nicolas HAREL
Notre Bienheureux Jean XXIII
“Le Pape Jean a laissé dans le souvenir de tous l’image d’un visage souriant et de deux bras ouverts pour embrasser le monde entier.” 1
Notice brève :
Nom: RONCALLI
Prénom: Ange Joseph (Angelo Giuseppe)
Pape sous le nom de Jean XXIII
Naissance: 25.11.1881 à Sotto il Monte
Mort: 03.06.1963 en la cité-état du Vatican
À Rome, près de saint Pierre, en 1963, le bienheureux Jean XXIII, pape. D’une humanité singulière, il mit tout en œuvre pour répandre en abondance la charité chrétienne, rechercher l’union fraternelle des peuples et, dans son souci principal de l’efficacité pastorale de l’Église du Christ dans le monde entier, il convoqua le second Concile œcuménique du Vatican.
Béatification: 03.09.2000 à Rome par le Bx Jean Paul II
Fête: 3 juin (dies natalis) ou 11 octobre (date anniversaire de l’ouverture du Concile Vatican II)
Dates repères : Prêtre en 1904. Evêque en 1925 comme Visiteur, puis Délégué apostolique en Bulgarie, puis en Turquie (1935). Nonce à Paris en 1944 à la Libération. Patriarche de Venise et Cardinal en 1953. Pape le 28 octobre 1958. Encyclique “Pacem in Terris” en 1963 (à la suite des crises de Berlin et de Cuba).
Martyrologe romain
“Il convoqua le Concile Vatican II qui marqua le début de la rénovation de l’Église, la réforme de ses structures et la révision de sa liturgie. Puissent ces réformes porter des fruits pour nous tous et l’Église du troisième millénaire”2.
Les grandes étapes d’une vie.
Angelo Giuseppe Roncalli naît en 1881 à Sotto il Monte dans le diocèse de Bergame en Lombardie. Il est le quatrième d’une famille de 14 enfants dont 10 survivront. Deux familles, dont les deux pères sont frères, vivent sous le même toit et exploitent une métairie. Avant d’être pape, Jean XXIII connaîtra donc les durs travaux des champs ce qui le gardera dans un contact toujours très réaliste et direct. Ce réalisme lui sera précieux pour détendre les relations dans un monde en mutation. Son oncle et parrain, Zaverio, est engagé dans l’action catholique.
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Les débuts de la vie sacerdotale.
Angelo entre au petit séminaire à l’âge de douze ans grâce à l’aide financière de son oncle et de prêtres dont le curé Giovanni Morlani, propriétaire des terres qu’exploitait sa famille. Elève assez brillant, il suit le cursus ecclésiastique classique, devenant boursier au séminaire dell’Apollinare de Rome. Il fait son service militaire en 1901 au 73e régiment d’infanterie, dans des conditions difficiles, pour que son frère reste sur l’exploitation.
Présenté au pape Pie X qu’il apprécie pourtant moins que son prédécesseur Léon XIII, il est ordonné prêtre en 1904.
En 1905, l’archevêque de de Bergame, Mgr Radini Tedeschi le choisit comme secrétaire. En même temps, il donne des cours au Séminaire et seconde son évêque dans son action pastorale et sociale.
C’est un prédicateur fort apprécié qui est passionné d’histoire3. En 1915, il est, comme sergent de l’armée royale italienne incorporé dans le service des santés des armées, avant de devenir aumônier militaire dans les hôpitaux.
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Les débuts d’une carrière à Rome.
Après la guerre, il revient au séminaire de Bergame comme directeur spirituel. Son activité le fait pressentir par le cardinal Willem Marinus van Rossum pour travailler au Vatican, à Rome aux œuvres pontificales missionnaires. Comme il ne souhaite pas forcément aller à Rome, sa réponse est assez caractéristique de sa personnalité : « Je suis un homme capable de peu. J’écris très lentement. Paresseux de nature, je me laisse facilement distraire dans mon travail ». Il est néanmoins nommé par Benoit XV et, en 1921, se trouve à la curie romaine, dans la Propaganda Fide (future Congrégation pour l’évangélisation des peuples) où il travaille en particulier au motu proprio de Pie XI (Romanorum Pontificum) sur la coopération des missions. Il profite aussi de cette charge pour visiter de nombreux diocèses et ordres missionnaires italiens. Il vit à Rome, modestement, avec deux de ses sœurs et se lie avec Montini (futur Paul VI), restant proche des milieux qui souhaitent une alliance de la démocratie chrétienne avec les antifascistes. Ayant fait un sermon sur le “nationalisme comme amour de la patrie” par opposition à une “militarisation de la nation”, il apparait comme rétif à la ligne de dialogue avec Mussolini que suit alors Pie XI soucieux de régler la question romaine.
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Une carrière diplomatique sous le signe de la paix.
En 1925, Pie XI le nomme Visiteur, puis Délégué apostolique en Bulgarie. Comme devise épiscopale, il choisit “Obedientia et pax”, devise qui donnera le cachet de toute son action. En effet, la paix est le fond de sa spiritualité.
Roncalli, arrive dans un pays traversé par des multiples tensions religieuses. Par une visite et un sermon, contribue à faire tomber la tension (« les bons sentiments vers nos frères séparés ne sont pas suffisants, si vous les aimez vraiment, donnez-leur le bon exemple et transformez votre amour en action»). Devant affronter l’épineuse question du rite latin et du rite oriental, il marque son habituelle bonhommie par de nombreuses visites dans la petite communauté urbaine catholique ou uniate. L’hôpital catholique soigne gratuitement les malades de toutes confessions, en particulier lors de l’attentat manqué à la cathédrale orthodoxe contre le roi Boris III.
En 1935, il est nommé Délégué apostolique en Turquie et il enrichit son expérience au contact des milieux orthodoxe et musulman. Mais sa promotion (avec un titre d’archevêque de Mesembria) pour le même poste à Istanbul comme délégué apostolique en Turquie et en Grèce entre 1935 et 1944, n’est guère plus aisée qu’en Bulgarie : dans un régime laïc (il doit se déplacer en civil, ce qui lui fait dire que l’on est prêtre aussi bien en pantalon qu’en soutane), il a tout de même un rôle diplomatique et œcuménique important. Sur le plan religieux, il indique dans un sermon en 1944, son désir d’un concile œcuménique.
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Mgr Roncalli dans la tourmente de la guerre.
Pendant la guerre, il joue un rôle important sur le plan diplomatique pour le sauvetage des victimes du nazisme, juifs, surtout mais aussi membres du clergé venus de toute l’Europe et particulièrement de Hongrie et de Bulgarie. Prévenu dès septembre 1940 des persécutions nazies par l’arrivée de réfugiés polonais, il fait distribuer des permis gratuits d’émigration par la délégation apostolique en particulier vers la Palestine sous mandat britannique, des certificats de baptêmes temporaires et des sauf-conduits, ainsi que des vivres et vêtements en s’appuyant sur la Croix Rouge locale. Il envoie une lettre au roi Boris III de Bulgarie pour qu’il désapprouve la déportation de 25 000 Juifs de Sofia. Il aide le rabbin Yitzhak HaLevi Herzog à alerter le Vatican pour sauver les juifs de Moldavie. Ces gestes pour ceux qu’il nomme les “cousins et compatriotes de Jésus” auraient sauvé de 24 000 à 80 000 Juifs, ce qui justifie pour la fondation internationale Raoul Wallenberg de demander son inscription comme juste entre les nations.
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Une mission délicate en France.
En décembre 1944, Pie XII le nomme Nonce à Paris. Dans la France libérée sonne l’heure des règlements de comptes et c’est une mission délicate qui est donnée à Mgr Roncalli : réussir à éviter l’expulsion de la plupart de ceux qui, parmi les évêques, sont soupçonnés de compromission avec l’occupant nazi. Plus qu’un diplomate qui gèrera magistralement le dossier de l’épuration et Pie XII ne doit accepter seulement que les démissions de trois prélats (sur les 25 demandées par le GPRF)4. Le nonce vient porter à Toulouse la barrette de cardinal pour Mgr Jules Saliège, qui avait protesté contre l’enfermement des Juifs et que le gouvernement français issu de la résistance souhaitait voir promu. Il entretient, semble-t-il, de bonnes relations avec le cardinal Suhard mais agace à la fois le pape et la diplomatie française par ses visites non protocolaires et chaleureuses en province, déroutant ses interlocuteurs par sa conversation volubile peu diplomatique. Ce comportement en apparence superficiel lui permet, en fait, d’éviter les conflits dans une période de tension pour l’État (la question de la laïcité de l’école est relancée) et surtout pour l’Église française, troublée par la question des prêtres ouvriers et une certaine contestation moderniste (nouvelle théologie ou ressourcement) que sanctionne Pie XII en 1950.
Premier observateur du Saint-Siège à l’UNESCO, il est créé cardinal en 1953, au moment de son départ. Côté français, il avait fait une certaine unanimité : Vincent Auriol (socialiste), comme Robert Schuman et De Gaulle le tiennent en haute estime pour sa francophilie, sa compréhension tolérante et sa bonhommie teintée d’humour (attribuant par exemple à la pluie le rétrécissement de la jupe d’une interlocutrice !). Signe de cette réussite, il reçoit la barrette de cardinal du président Vincent Auriol qui en avait fait la demande, au titre d’un ancien privilège des souverains français. Pour le Saint Siège, il a été “un observateur attentiste, prudent et plein de confiance envers les nouvelles initiatives pastorales” du clergé français.
En 1953, il est nommé Patriarche de Venise et Cardinal et quitte donc la nonciature de Paris.
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Patriarche de Venise.
De retour en Italie, il organise un synode diocésain, utilisant les transports en commun, les gondoles, multipliant les signes de présence joviale et d’ouverture en direction des paroissiens (« Je veux être votre frère, aimable et compréhensif ») et des Italiens, comme ce message de bienvenue lors du congrès des socialistes en 1957. Mais il ne prend pas de position divergente par rapport à Pie XII (il condamne ainsi, en 1957, “les cinq plaies crucifiant aujourd’hui : l’impérialisme, le marxisme, la démocratie progressiste, la franc-maçonnerie et la laïcité”).
Le pontificat de Pie XII avait été très long (19 ans), et marqué par une centralisation progressive et un exercice jugé solitaire du pouvoir. Après trois jours de conclave et dix tours de scrutin infructueux, le cardinal Roncalli apparait comme un « pape de transition » idéal au terme d’un conclave cherchant à assurer un changement sans rupture. Le 28 octobre 1958, il est élu Pape. C’est presque consolant de constater combien nous nous retrouvons dans sa description, en face de ses résolutions multiples. Il est devenu pape parce que l’œuvre de la grâce a collaboré mystérieusement avec sa nature. Il a fait l’expérience de ses limites misérables; la miséricorde de Dieu s’est portée à son secours !
Par la simplicité de son âme et sa singulière bonté, il conquiert les cœurs. Témoin, cette réflexion d’une femme dans une salle de cinéma à Lausanne au moment où l’on voyait Jean XXIII aux ‘Actualités’: “Ce Pape, il a beau être catholique, c’est un type formidable”.
Il crée une première surprise en choisissant de s’appeler « Jean XXIII » (Ioannes XXIII), reprenant un nom abandonné depuis le XIVe siècle (Jean XXII fut pape de 1316 à 1334), lui aussi à l’issue d’une élection mouvementée et chez qui on avait également vu un « pape de transition » en raison de son âge (72 ans), mais qui régna 18 ans. Le choix d’un nom qui n’avait plus été utilisé depuis plus de cinq cents ans devait également marquer le changement de style de gouvernement. Jean XXIII est couronné de la tiare le 4 novembre 1958.
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Des intuitions novatrices pour répondre aux exigences d’un monde qui change.
Dès le début de son pontificat, il met l’accent sur l’aspect pastoral de sa charge ; c’est ainsi qu’il est le premier, depuis Pie IX, à sortir de l’enceinte du Vatican après son élection, ce qui lui permet d’assumer pleinement son rôle d’évêque de Rome, souvent négligé par ses prédécesseurs. Il prend solennellement possession de la basilique Saint-Jean du Latran et visite les paroisses romaines. Sa visite en prison marque les esprits. Symboliquement, il rompt avec la tradition des repas solitaires et recommande à la direction de l’Osservatore Romano de cesser l’usage des superlatifs d’usage pour qualifier le souverain pontife. Il convoque le Synode romain, décide la révision du Code de Droit Canon de 19176.
Un Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens est créé, et a pour résultat la présence de plusieurs dizaines d’observateurs d’Églises chrétiennes non catholiques au concile.
Le 25 janvier 1959, il annonce la convocation d’un Concile Œcuménique (Vatican II) qui ouvre une nouvelle page de l’histoire de l’Église. Dans son discours d’ouverture du concile le pape souligne des continuités et des ruptures :
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« L’humble successeur du Prince des apôtres qui vous parle, le dernier en date, a voulu en convoquant ces importantes assises donner une nouvelle affirmation du magistère ecclésiastique toujours vivant et qui continuera jusqu’à la fin des temps. Par le Concile, en tenant compte des erreurs, des besoins et des possibilités de notre époque, ce magistère sera présenté aujourd’hui d’une façon extraordinaire à tous les hommes qui vivent sur la Terre. (…) Ce qui est très important pour le Concile œcuménique, c’est que le dépôt sacré de la doctrine chrétienne soit conservé et présenté d’une façon plus efficace. »
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“A notre époque, l’Epouse du Christ préfère se servir du remède de la miséricorde, plutôt que de faire usage de la sévérité; elle considère qu’elle doit aller au-devant des nécessités actuelles en montrant la valeur de sa doctrine, au lieu de la condamnation”.
Jean XXIII demande que la question des relations de l’Église catholique avec les Juifs soit abordée au concile. Plus généralement, les conclusions très substantielles de ce concile aboutissent à inviter les catholiques, tout en rappelant leur devoir de fidélité à leur foi, à faire preuve de tolérance envers les fidèles des autres religions (Œcuménisme). Elles affirment, dans la déclaration Nostra Ætate, et ce d’ailleurs dans la lignée du concile de Trente, que ni les Juifs du temps du Christ, ni les Juifs d’aujourd’hui ne peuvent être considérés comme plus responsables de la mort de Jésus que les chrétiens eux-mêmes.
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Le pape face à un monde troublé.
Jean XXIII choisit de dater sa dernière encyclique au 11 avril 1963 (jeudi saint). Il veut offrir au monde comme un cadeau: “Pacem in Terris”. Pour la première fois, une encyclique ne s’adresse pas qu’aux évêques et aux fidèles, mais à “tous les hommes de bonne volonté”. Tous les hommes, qu’ils le sachent ou non, qu’ils y croient ou non, sont l’objet de la bienveillance et de la sollicitude divines. Fidèle à l’inspiration de toute sa vie et à sa charge pastorale, le Saint-Père n’exclut personne. Il reprend dans ce message de paix l’essentiel de ses convictions :
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il fait l’apologie de la démocratie
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affirme que la guerre ne peut être un instrument de justice et préconise que ce soit désormais la « loi morale » qui régisse la relation entre les états7
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il prône la solidarité, la justice et la liberté
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la fin du bon pape Jean.
En mai 1963, quelques jours avant d’être emporté par un cancer, il dit à des directeurs des Œuvres Pontificales Missionnaire: “Depuis plus de 40 ans, je suis au service des Missions, j’y resterai jusqu’à ma mort”. Le 11 mai, il reçoit le prix Balzan pour son engagement en faveur de la paix. C’est là sa dernière apparition publique.
Atteint d’un cancer de l’estomac et de la prostate, il est victime d’une hémorragie le 28 mai 1963. À partir de ce jour, Radio Vatican transmet quotidiennement un bulletin de santé du pape, l’entourage indiquant que, entre lucidité et inconscience, il continue de tenir son rôle jusqu’aux derniers moments. À l’issue d’une longue agonie, il meurt le 3 juin 1963, jour du lundi de Pentecôte.
Dans son testament il écrit: “Ce qui compte le plus dans la vie est Jésus Christ béni, sa Sainte Église, son Évangile, la vérité et la bonté”.
Encycliques
Les huit encycliques que nous laisse Jean XXIII démontrent son souci de la pleine évangélisation qui invite à la collaboration au salut du monde ; gouvernants et individus chacun doit y contribuer.
- Pacem in terris, 11 avril 1963, sur la paix ;
- Pænitentiam agere, 1er juillet 1962, sur le futur concile ;
- Aeterna Dei Sapientia, 11 novembre 1961 ;
- Mater et Magistra, 15 mai 1961, commémoration de Rerum novarum ;
- Princeps Pastorum, 28 novembre 1959 sur les missions ;
- Gratia Recordatio, 26 septembre 1959, sur le Rosaire ;
- Sacerdotii nostri primordia, 31 juillet 1959, sur Jean-Marie Vianney, curé d’Ars ;
- Ad Petri Cathedram, (29 juin 1959), inauguration du pontificat.
Jean XXIII dans les textes.
- Décalogue de la sérénité, du Bienheureux Pape Jean XXIII
« 1 – Rien qu’aujourd’hui, j’essaierai de vivre exclusivement la journée, sans tenter de résoudre le problème de toute ma vie.
2 – Rien qu’aujourd’hui, je porterai mon plus grand soin à mon apparence courtoise et à mes manières ; je ne critiquerai personne et ne prétendrai redresser ou discipliner personne, si ce n’est moi-même.
3 – Rien qu’aujourd’hui, je serai heureux, dans la certitude d’avoir été créé pour le bonheur, non seulement dans l’autre monde, mais également dans celui-ci.
4 – Rien qu’aujourd’hui, je m’adapterai aux circonstances, sans prétendre que celles-ci se plient à tous mes désirs.
5 – Rien qu’aujourd’hui, je consacrerai dix minutes à la bonne lecture, en me souvenant que, comme la nourriture est nécessaire à la vie du corps, la bonne lecture est nécessaire à la vie de l’âme.
6 – Rien qu’aujourd’hui, je ferai une bonne action et n’en parlerai à personne.
7 – Rien qu’aujourd’hui, je ferai au moins une chose que je n’aurai pas envie de faire ; et si j’étais offensé, j’essaierai que personne ne le sache.
8 – Rien qu’aujourd’hui, j’établirai un programme détaillé de ma journée. Je ne m’en acquitterai peut-être pas entièrement, mais je le rédigerai. Et je me garderai de deux calamités : la hâte et l’indécision.
9 – Rien qu’aujourd’hui, je croirai fermement – même si les circonstances prouvent le contraire – que la bonne Providence de Dieu s’occupe de moi comme si rien d’autre n’existait au monde.
10 – Rien qu’aujourd’hui, je ne craindrai pas. Et tout spécialement, je n’aurai pas peur d’apprécier ce qui est beau et de croire en la bonté. Je suis en mesure de faire le bien pendant douze heures, ce qui ne saurait pas me décourager, comme si je pensais que je dois le faire toute ma vie durant. »
- Jean XXIII, Prière à Jésus devant le Saint Sacrement, in Discorsi, Messaggi, Colloqui, Éds. Vatican, t. 4, p. 395.
Jésus, nourriture des âmes qui dépasse toute réalité naturelle, ce peuple immense crie vers toi. Il s’efforce de donner à sa vocation humaine et chrétienne un nouvel élan, de l’embellir de vertus intérieures, toujours prêt au sacrifice dont tu es l’image même, par la parole et par l’exemple. Tu es le premier de nos frères ; tu as précédé les pas de chacun de nous ; tu as pardonné les fautes de tous. Et tu les appelles tous à un témoignage de vie plus noble, plus actif, plus compréhensif.
Jésus, « pain de vie » (Jn 6, 35), unique et seul aliment essentiel de l’âme, accueille tous les peuples à ta table. Elle est déjà la réalité divine sur la terre, le gage des bontés célestes, la certitude d’une entente heureuse entre les peuples et d’une lutte pacifique en vue du vrai progrès et de la civilisation. Nourris par toi et de toi, les hommes seront forts dans la foi, joyeux dans l’espérance, actifs dans la charité. Les bonnes volontés triompheront des pièges tendus par le mal ; elles triompheront de l’égoïsme, de la paresse. Et les hommes droits et craignant Dieu entendront s’élever de la terre, dont l’Église ici-bas veut être l’image, les premiers échos mystérieux et doux de la cité de Dieu. Tu nous conduis aux bons pâturages ; tu nous protèges. Montre-nous, Jésus, les biens de la terre des vivants (Ps 26, 13).
- La voie royale de la sainte croix dans Jean XXIII, Journal de l’âme, 1930, retraite à Rusciuk.
L’amour de la croix de mon Seigneur m’attire de plus en plus ces jours-ci. Jésus béni, que ce ne soit pas là un feu de paille qui s’éteindra à la première pluie, mais un incendie qui brûle sans jamais se consumer ! J’ai trouvé ces jours-ci une autre belle prière qui correspond très bien à mes conditions spirituelles… :
Ô Jésus, mon amour crucifié, je vous adore dans toutes vos souffrances… J’embrasse de tout mon cœur, pour l’amour de vous, toutes les croix de corps et d’esprit qui m’arriveront. Et je fais profession de mettre toute ma gloire, mon trésor et mon contentement dans votre croix, c’est-à-dire dans les humiliations, privations et souffrances, disant avec Saint Paul : « Que jamais je ne me glorifie, sinon dans la croix de notre Seigneur Jésus Christ » (Ga 6, 14). Quant à moi, je ne veux d’autre paradis en ce monde que la croix de mon Seigneur Jésus Christ…
Tout me persuade que le Seigneur me veut tout pour lui, sur la « voie royale de la sainte croix ». Et c’est sur cette voie, et non sur une autre, que je veux le suivre…
Une note caractéristique de cette retraite a été une grande paix et une grande joie intérieures, qui me donnent le courage de m’offrir au Seigneur pour tous les sacrifices qu’il voudra demander à ma sensibilité. De ce calme et de cette joie, je veux que toute ma personne et toute ma vie soient toujours plus pénétrées, au-dedans et au-dehors… Je veillerai à garder cette joie intérieure et extérieure… La comparaison de Saint François de Sales que je me plais à répéter parmi d’autres : « Je suis comme un oiseau qui chante dans un buisson d’épines », doit être une continuelle invitation pour moi. Donc, peu de confidences sur ce qui peut faire souffrir ; beaucoup de discrétion et d’indulgence en jugeant les hommes et les situations ; m’efforcer de prier spécialement pour ceux qui me font souffrir ; et puis en toute chose une grande bonté, une patience sans limites, en me souvenant que tout autre sentiment… n’est pas conforme à l’esprit de l’Évangile et de la perfection évangélique. Du moment que je fais triompher la charité à tout prix, je veux bien passer pour un homme de rien. Je me laisserai écraser, mais je veux être patient et bon jusqu’à l’héroïsme.
Le Bienheureux Jean XXIII vu par le Bienheureux Jean-Paul II
- Extrait de l’homélie prononcé par le Bienheureux Jean-Paul II lors de la messe de béatification du dimanche 3 septembre 2000
« Nous contemplons aujourd’hui dans la gloire du Seigneur un autre Pontife8, Jean XXIII, le Pape qui frappa le monde par son comportement affable, duquel transparaissait sa singulière bonté d’âme. Les desseins divins ont voulu que cette béatification rassemble deux Papes ayant vécu dans des contextes historiques très différents, mais liés, au-delà des apparences, par de nombreuses ressemblances sur le plan humain et spirituel. On connaît la profonde vénération que le Pape Jean XXIII avait pour Pie IX, dont il souhaitait la béatification. Au cours d’une retraite spirituelle, en 1959, il écrivait dans son Journal: “Je pense toujours à Pie IX de sainte et glorieuse mémoire, et l’imitant dans ses sacrifices je voudrais être digne d’en célébrer la canonisation” (Journal de l’Ame, Ed. San Paolo, 2000, p. 560).
Le Pape Jean a laissé dans le souvenir de tous l’image d’un visage souriant et de deux bras ouverts pour embrasser le monde entier. Combien de personnes ont été conquises par la simplicité de son âme, liée à une vaste expérience des hommes et des choses! Le souffle de nouveauté qu’il apporta ne concernait pas la doctrine, mais plutôt la façon de l’exposer; sa façon de parler et d’agir possédait un style nouveau, l’attitude de sympathie avec laquelle il approchait les personnes communes et les puissants de la terre était nouvelle. Ce fut dans cet esprit qu’il lança le Concile œcuménique Vatican II, avec lequel il ouvrit une nouvelle page de l’histoire de l’Eglise: les chrétiens se sentirent appelés à annoncer l’Evangile avec un courage renouvelé et une plus grande attention aux “signes” des temps. Le Concile fut véritablement une intuition prophétique de ce Pontife âgé qui inaugura, au milieu de nombreuses difficultés, une saison d’espérance pour les chrétiens et pour l’humanité.
Lors des derniers moments de son existence terrestre, il confia son testament à l’Eglise: “Ce qui compte le plus dans la vie est Jésus-Christ béni, sa Sainte Eglise, son Evangile, la vérité et la bonté”.
Nous voulons aujourd’hui accueillir nous aussi ce testament, alors que nous rendons gloire à Dieu pour nous l’avoir donné comme Pasteur.
- Extrait de l’audience accordée aux pèlerins réunis par le Bx Jean-Paul II, pour la béatification de 5 serviteurs de Dieu le 4 septembre 2000
Angelo Giuseppe Roncalli acquit les traits fondamentaux de sa personnalité dans le milieu familial. “Le peu de choses que j’ai appris de vous à la maison – écrivait-il à ses parents – sont encore les plus précieuses et les plus importantes; elles soutiennent et donnent vie et chaleur aux nombreuses choses que j’ai apprises par la suite”. Plus il avançait dans la vie et dans la sainteté, plus il gagnait le cœur de tous par sa simplicité et sa sagesse.
Dans la célèbre Encyclique Pacem in terris, il proposa aux croyants et aux non-croyants l’Evangile comme voie pour atteindre le bien fondamental de la paix: en effet, il était convaincu que l’Esprit de Dieu fait entendre sa voix d’une façon ou d’une autre à chaque homme de bonne volonté. Il ne se troubla pas face aux épreuves, mais sut toujours regarder avec optimisme les divers épisodes de l’existence. “Il suffit de prendre soin du présent: il n’est pas nécessaire d’utiliser l’imagination et la préoccupation pour la construction de l’avenir”. C’est ce qu’il écrivait en 1961 dans le Journal de l’Ame.
En adressant mon salut à tous ceux qui sont venus spécialement de Bergame et de Venise avec le Cardinal Cé et Mgr Amadei, je souhaite que l’exemple du Pape Jean encourage à avoir toujours confiance dans le Seigneur, qui guide ses fils le long des sentiers de l’histoire.
1 Homélie prononcé par le Bienheureux Jean-Paul II lors de la messe de béatification du dimanche 3 septembre 2000. Voir ci-dessous.
4 les évêques de Mende, Aix-en-Provence et Arras, et quelques autres personnalités (l’auxiliaire de Paris, et trois vicaires d’outremer)